L’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales dispose, dans sa rédaction applicable depuis le 1er mars 2020, que :
« Dans les communes de 1 000 habitants et plus, lorsque des informations générales sur les réalisations et sur la gestion du conseil municipal sont diffusées par la commune, un espace est réservé à l’expression des conseillers élus sur une liste autre que celle ayant obtenu le plus de voix lors du dernier renouvellement du conseil municipal ou ayant déclaré ne pas appartenir à la majorité municipale.
Les modalités d’application du présent article sont définies par le règlement intérieur du conseil municipal ».
Auparavant, ces dispositions n’étaient applicables que dans les communes de 3 500 habitants et plus et étaient rédigées en des termes, quelque peu différents.
Les groupes politiques d’opposition des communes de 1 000 habitants et plus, doivent désormais disposer d’une tribune d’expression dans le bulletin municipal, mais également dans tout support d’information diffusé par la commune, notamment les supports numériques, lorsque ces derniers présentent les caractéristiques d’un bulletin d’information générale sur la réalisation ou sur la gestion du conseil municipal.
La Cour administrative d’appel de Versailles a jugé dans l’arrêt n° 17VE02810 du 18 octobre 2018, que :
« 4. Il résulte des dispositions précitées de l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales qu’il appartient au conseil municipal de déterminer les conditions de mise en œuvre du droit d’expression des conseillers municipaux d’opposition dans les bulletins d’information générale portant sur les réalisations et la gestion du conseil municipal (…). Enfin l’espace réservé aux conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale doit, sous le contrôle de juge, présenter un caractère suffisant et être équitablement réparti.
5. Il ressort des pièces du dossier que, par l’article 6-2 de son règlement intérieur, le conseil municipal a attribué au sein du bulletin d’information municipale » Crosne Info » une page de tribunes à répartir entre l’ensemble des groupes du conseil municipal, y compris le groupe majoritaire, ce qui réserve une demi-page à attribuer aux groupes d’opposition municipale au nombre de quatre dans la limite minimale de 750 caractères par groupe. Eu égard au caractère mensuel de cette publication et à la circonstance qu’elle comprend en tout une trentaine de pages, la commune de Crosne n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a estimé que l’espace réservé à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale était insuffisant, et de ce fait, non conforme aux dispositions précitées de l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales (…) ».
Ainsi, le règlement intérieur doit prévoir les modalités de mise en œuvre du droit d’expression des élus dans les supports d’information. L’espace réservé aux conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale, doit présenter un caractère suffisant et doit être équitablement réparti.
Ce caractère équitable va s’apprécier au regard de la périodicité des publications générales, du nombre de groupes d’oppositions municipales, de l’espace visuel qui leur est réservé dans les publications au regard du nombre de pages totales et de leur ampleur, mais également au regard de la tribune d’expression réservée au groupe majoritaire.
En effet, ces dispositions n’excluent pas le droit d’expression d’un groupe majoritaire, qui doit être considéré différemment de l’information institutionnelle, délivré par la municipalité ou la publication et notamment l’édito du maire.
Le règlement intérieur doit donc être rédigé en des termes particulièrement précis et doit prendre en compte l’ensemble des publications générales de la commune. Le règlement intérieur peut donc parfaitement prévoir un nombre de caractères fonction de la représentativité de chaque groupe, tout en présentant un caractère suffisant.
Enfin, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé dans l’arrêt n° 17BX00530 du 18 novembre 2019, que :
« (…). Ni le conseil municipal, ni le maire de la commune ne sauraient, en principe, contrôler le contenu des articles publiés, sous la responsabilité de leurs auteurs, dans cet espace. Ainsi, si le maire d’une commune, en sa qualité de directeur de publication d’un bulletin d’information municipal, est en droit de refuser de publier un écrit qu’il estime diffamatoire ou injurieux, ou portant atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs, lorsqu’il ressort à l’évidence de son contenu qu’un tel article est de nature à engager la responsabilité pénale du directeur de la publication, notamment s’il présente un caractère manifestement outrageant, diffamatoire ou injurieux de nature à engager la responsabilité du maire, directeur de publication du bulletin municipal, sur le fondement des dispositions précitées de la loi du 29 juillet 1881, il ne saurait pour autant porter au droit d’expression des élus, qui constitue une liberté fondamentale et une condition essentielle du débat démocratique, des restrictions au-delà de ce qui est nécessaire pour respecter les droits d’autrui ».
Le juge administratif rappelle que les seules limites à l’expression municipale des élus d’opposition sont constituées des propos diffamatoires ou injurieux, notamment lorsqu’ils présentent un caractère manifestement outrageant.
Autrement dit, les simples propos de désaccords politiques ne peuvent fonder de la part du maire, directeur de publication, le refus de publier un écrit.
Les limites au droit d’expression, qui sont celles définies par les dispositions de la loi du 29 juillet 1881, peuvent parfaitement être rappelées dans le règlement intérieur.
Thomas Porchet
Avocat
DROUINEAU 1927