Les modalités de rémunération de l’architecte en cas de modification de programme

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Les modalités de rémunération de l’architecte en cas de modification de programme

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Les modalités de rémunération de l’architecte en cas de modification de programme

Dans une décision récente du 27 décembre 2019 la cour administrative d’appel de Nancy est venue apporter sa pierre à l’édifice de la construction jurisprudentielle quant aux modalités de rémunération de l’architecte.

L’arrêt numéro 18 NC 01 947 rappelle qu’il résulte des dispositions de la loi du 12 juillet 1985 et du décret du 29 novembre 1993 que le titulaire d’un contrat de maîtrise d’œuvre est rémunéré par un prix forfaitaire couvrant l’ensemble de ses charges et missions ainsi que le bénéfice qu’il en escompte et que seule une modification de programme ou une modification de prestations décidée par le maître d’ouvrage peut donner lieu à une adaptation et le cas échéant à une augmentation de sa rémunération.

Désormais codifiés aux articles L 2430-1 et R 2431-1 et suivants du code de la commande publique, ces dispositions devraient engendrer le même type de décision des juridictions administratives.

Ce principe est posé depuis de nombreuses années par la jurisprudence et notamment par un arrêt de la cour d’appel de Douai du 4 avril 2019 qui en avait largement rappelé les contours (instance n° 16DA01505).

Allant plus loin dans ses indications, la cour rappelle que dans l’hypothèse où une modification de programme et de prestations a été décidée par le maître de l’ouvrage, le droit du maître d’œuvre à l’augmentation de sa rémunération est uniquement subordonné à l’existence de prestations supplémentaires de maîtrise d’œuvre utiles à l’exécution des modifications décidées par le maître d’ouvrage.

Mais, et c’est un point tout à fait significatif, elle rappelle également que ce droit n’est subordonné ni à l’intervention de l’avenant qui doit normalement être signé en application des dispositions de l’article 30 du décret du 29 décembre 1993, ni même, à défaut avenant, à celle d’une décision par laquelle le maître d’ouvrage donnerait son accord sur un nouveau montant de rémunération du maître d’œuvre.

En outre, le maître d’œuvre ayant effectué des missions non prévues au marché de maîtrise d’œuvre et qui n’ont pas été décidées par le maître d’ouvrage, a droit à être rémunéré de ces missions ou prestations nonobstant le caractère forfaitaire du prix fixé par le marché si elles ont été indispensables à la réalisation d’ouvrages selon les règles de l’art ou si le maître d’œuvre a été confronté dans l’exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l’économie du contrat.

L’extrait fidèle de ce considérant de principe éclaire de manière très limpide les conditions dans lesquelles le maître d’œuvre a droit à une augmentation de sa rémunération.

Il convient que des prestations supplémentaires de maîtrise d’œuvre utiles à l’exécution des modifications décidées par le maître de l’ouvrage soient identifiées.

Si aucune décision n’a été prise par la maîtrise d’ouvrage, les prestations supplémentaires exécutées cependant par le maître d’œuvre peuvent être rémunérées si elles ont été indispensables à la réalisation de l’ouvrage selon les règles de l’art.

Enfin, et c’est la troisième hypothèse, le maître d’œuvre a droit à la rémunération des prestations supplémentaires qu’il accomplit si ces dernières ont été rendus nécessaires par des sujétions imprévues présentant un caractère imprévisible exceptionnel et extérieur aux parties, et qui ont eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat.

Il y a, dans l’approche de la rémunération du maître d’œuvre, une grande rigueur et, à la clé, un véritable risque pour ce dernier de n’être purement et simplement pas payé de prestations supplémentaires qu’il aura pourtant exécutées.

Pour pallier un tel risque, les parties ont le plus grand intérêt à écrire très régulièrement le déroulement du chantier et à s’entendre sur ce qui y est inclus et sur ce qui excède les prestation initiale.

Dans la préparation du marché, une très grande précision dans les pièces techniques et juridiques sera également requise.

Car la conséquence d’une confusion dans la rédaction initiale est l’absence de possibilité de déterminer ce qui relève des prestations initiales de ce qui relève de prestations supplémentaires en phase d’exécution.

Enfin, l’un des enseignements majeurs de ce courant jurisprudentiel est l’absence d’effet d’une prolongation.

Si le marché dure plus longtemps, cela ne constitue pas une condition suffisante pour que le maître d’œuvre soit rémunéré davantage.

Dans le suivi des marchés, on ne peut qu’inviter l’opérateur public comme le maître d’œuvre à faire montre de la plus grande vigilance, et à dialoguer sans cesse.

Thomas Drouineau
DROUINEAU 1927
Ancien Bâtonnier
Avocat spécialiste en droit public