Urbanisme et prévention des incendies : un projet de décret pris en application de la loi du 10 juillet 2023 complète le régime des « zones de dangers »
La loi n°2023-580 du 10 juillet 2023 renforce les outils de lutte contre les incendies, notamment par l’information préventive et la maîtrise de l’urbanisation. Pris en application des articles 23 et 26 de la loi, un projet de décret actuellement en consultation a pour objet d’étoffer ces nouvelles dispositions. Précisions.
L’article 26 de la loi du 10 juillet 2023 crée un nouvel outil de prévention : l’établissement de « zones de dangers » soumises à un régime d’occupation des sols particulier.
Tout commence d’abord par l’établissement d’une carte nationale qui reflète, pour l’ensemble du territoire de l’hexagone et de la Corse, le niveau de sensibilité aux feux de plus de 20 ha, établie selon un maillage précis. Cette carte a été publiée en juillet 2023 et peut être retrouvée ici. Sur le fondement de cette carte, les communes exposées à un danger élevé de feux de forêt et de végétation sont listées par arrêté interministériel.
Les zones de dangers ne sont établies que sur le territoire des communes listées et dont le territoire n’est pas couvert par un PPRIF (plan de prévention des risques naturels prévisibles d’incendie de forêt). Le préfet de département peut délimiter une partie de leur territoire comme « zone de danger », pour les terrains exposés à un « danger élevé ou très élevé de feux de forêt de végétation » (article L567-4 du Code de l’environnement). Le projet de délimitation est soumis à l’avis du conseil municipal et de l’organe délibérant de l’EPCI.
Dans cette zone de danger, le préfet « peut » rendre immédiatement opposables certaines règles d’urbanismes posées à l’article L567-5, par une décision rendue publique. On distingue alors :
- Les espaces urbanisés de la zone de danger, où sont interdits par principe tous les aménagements nouveaux[1] de quelque nature qu’ils soient. Par exception, peuvent être autorisés, sous conditions, les travaux de rénovation et extensions, les constructions et installations nécessaires à des services publics ainsi que les locaux techniques nécessaires à la gestion de la forêt. Sont autorisés sans prescriptions les aménagements nécessaires à la lutte contre les incendies.
- En dehors des espaces urbanisés de la zone de danger, seuls peuvent être autorisés, sous conditions, les aménagements nécessaires à la lutte contre les incendies, à la gestion de la forêt et aux services publics.
[1] Le terme aménagement est ici utilisé au sens large, l’article désigne les « ouvrages, aménagements, installations ou constructions ».
Si le préfet décide de rendre ces règles effectives, elles seront directement opposables et ne nécessitent pas de transposition dans les documents d’urbanisme. La zone de danger est annexée au PLU et vaut servitude d’utilité publique.
Le décret actuellement en consultation ajoute un nouveau chapitre dans la partie réglementaire du Code de l’environnement intitulé « Dispositions particulières relatives à la prévention des incendies de forêt et de végétation », qui prévoit que :
- Pour l’établissement de la carte de sensibilité nationale, l’avis des associations représentant les communes est réputée favorable après 2 mois laissés sans réponse (nouvel article R567-1).
- Pour délimiter les zones de danger, un nouvel article R567-2 précise que le préfet prend en compte la carte de sensibilité ainsi que « d’éventuelles informations robustes complémentaires sur les aléas dont il dispose ».
La carte nationale de sensibilité n’est pas opposable juridiquement mais constitue une source d’information de référence : outre la définition des zones de dangers, les élus compétents en matière d’urbanisme sont incités à la prendre en compte pour « l’adaptation des décisions d’urbanisme en conséquence » (circulaire du ministre de la Transition Ecologique du 26 juillet 2023).
Enfin, notons que le décret a également pour objet de préciser le régime des OLD (obligations légales de débroussaillement). Pour rappel, l’article 23 de la loi du 10 juillet 2023 impose, à partir du 1er janvier 2025, au vendeur ou le bailleur d’un bien immobilier concerné par une zone assujettie à des OLD d’en informer le potentiel acquéreur ou locataire à chaque étape de la vente ou de la location.
Le projet de décret est ouvert à la consultation du public jusqu’au 10 mars 2024 et peut être retrouvé ici.