Sans autorisation domaniale : les ouvrages de défense contre la mer tombent à l’eau
Le récent jugement du Tribunal administratif de Rennes rappelle l’importance d’une gestion commune et mutualisée du recul du trait de côte. Il ne sert à rien de lutter seul contre l’avancée de la mer, et encore moins sans autorisation.
De manière classique, nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public (articles L2122-1 du CG3P et suivants).
Or, le domaine public maritime comprend notamment le rivage de la mer, c’est à dire tout ce qu’elle couvre et découvre en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles (Article L2111-4 du CG3P).
Vous l’aurez compris, le domaine public maritime s’étend en même temps que l’eau monte.
Dans cette affaire, en vertu d’une autorisation d’urbanisme délivrée, un concarnois a érigé un mur de soutènement de 34 mètres de long et de 3 mètres de haut devant sa propriété afin de lutter contre l’érosion.
En revanche, ces travaux, pour partie édifiés sur l’emprise du domaine public maritime, ont été exécutés sans autorisation d’occupation de ce domaine public.
Le Tribunal rappelle donc naturellement que : « une autorisation d’urbanisme ne vaut pas autorisation d’occupation du domaine public maritime, alors même que les plans de la déclaration préalable laissaient suggérer que le pied du mur serait en-dessous du niveau 0 ».
Par conséquent, cette occupation du domaine public, sans autorisation préalable, est irrégulière et constitutive d’une contravention de grande voierie, et ce, même s’il s’agit d’un ouvrage de défense contre l’érosion dont l’intérêt général pourrait être défendu.
L’administré a été condamné par le Tribunal à régler une amende d’un montant de 1 000 euros et à démolir l’ouvrage.
Ce jugement ne va pas sans rappeler l’histoire de Benoît Bartherottelequel a érigéet entretien depuis une quarantaine d’années un ouvrage exceptionnel de près de 450 mètres de long pour protéger la pointe du Cap-Ferret de l’érosion.
Néanmoins, cette lutte vaine a été rendue possible dès lors que l’État, après une première contestation, a finalement reconnu la digue d’utilité publique et a octroyé une autorisation d’occupation domaniale.
Finalement, l’édification d’un ouvrage de défense contre la mer nécessite une autorisation d’occupation du domaine public maritime lorsqu’elle prend appui, même pour partie, sur ce dernier.
De manière générale, l’édification de ce type d’ouvrage doit être le fruit d’une réflexion commune sur le long terme : il convient de garder à l’esprit qu’un ouvrage de protection peut également avoir des incidences négatives.
Les enjeux sont immenses, et nécessitent une approche partenariale entre l’État et les collectivités, dans une vision patrimoniale.
TA Rennes, 1er mars 2024, n° 2300342