Imputabilité au service d’une dépression : un cas particulier concernant les fonctions de secrétaire général d’une commune

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Imputabilité au service d’une dépression : un cas particulier concernant les fonctions de secrétaire général d’une commune

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Droit de la fonction publique

Imputabilité au service d’une dépression : un cas particulier concernant les fonctions de secrétaire général d’une commune

Dans le contentieux relatif à l’imputabilité au service d’une pathologie psychique, il est de jurisprudence constante qu’il appartient au juge d’apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l’absence de volonté délibérée de nuire à l’agent, être regardées comme étant directement à l’origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée et, dans le cas où sont en cause des troubles psychiques, de prendre en considération l’ensemble des éléments du dossier permettant d’établir que ces troubles sont imputables à un fait précis ou à des circonstances particulières de service.

La Cour administrative d’appel de Bordeaux a été amenée à apprécier la situation d’une secrétaire générale de mairie sollicitant l’imputabilité au service de sa pathologie d’épuisement professionnel, qu’elle estimait être en lien avec la situation vécue au lendemain du second tour des élections municipales de 2014.

En effet, à la suite du second tour des élections municipales de 2014, une nouvelle équipe se mettait en place et la secrétaire générale, premier collaborateur du maire, était placée en arrêt maladie dès le lendemain.

Le juge administratif devait donc apprécier dans quelle mesure une pathologie liée à un épuisement professionnel, aurait pu être déclenchée par cette situation particulière.

Dans son arrêt n° 18BX03976 du 14 décembre 2020, la Cour administrative d’appel de Bordeaux considère que :

« En deuxième lieu, Mme B… soutient que son état anxio-dépressif est en relation directe avec ses fonctions de secrétaire générale auprès de la commune de P, et qu’en particulier, la dégradation de son état de santé est issue du harcèlement moral qu’elle dit avoir subi de la part de la nouvelle équipe municipale, à la suite des élections du printemps 2014. Elle s’appuie notamment sur le certificat du Dr V, psychiatre, du 5 avril 2016 et les expertises du Dr C, psychiatre, du 6 novembre 2014 et du 23 avril 2015, qui attestent tous d’un  » état dépressif majeur « . Cependant, si ces avis médicaux évoquent un épuisement professionnel, dû à un conteste de stress et de dévalorisation personnelle dans le cadre de ses fonctions, ils ne font que relayer à cet égard le ressenti de l’intéressée, alors en outre que si Mme B… invoque des relations conflictuelles avec la nouvelles équipe municipale, voire une situation de harcèlement, il est constant que cette équipe est issue du second tour des municipales, le 30 mars 2014, que l’intéressée a été placée en arrêt-maladie dès le 31 mars au matin et qu’elle n’a jamais repris son service auprès de la commune (…). Dans ces conditions, les pièces du dossier ne permettent pas d’établir que les troubles psychiques dont souffre la requérante seraient en lien direct avec les fonctions qu’elle a exercées auprès de la commune de P avant le 31 mars 2014 (…) ».

Le juge administratif précise d’une part, que les avis médicaux qui ne constituaient pas des expertises contradictoires, se bornaient à relayer le ressenti de l’intéressée et d’autre part, que les relations conflictuelles avec la nouvelle équipe municipale n’étaient pas établies compte tenu du fait qu’elle était issue du second tour des élections municipales du 30 mars 2014 et que l’agent était placée en arrêt maladie, dès le 31 mars au matin.

Autrement dit, le conseil municipal d’installation n’avait pas encore eu lieu et la pathologie pouvait être regardée comme s’étant déclenchée d’elle-même en préjugeant de la situation qui aurait pu découler de l’exercice du mandat par la nouvelle équipe municipale, sans qu’aucune situation concrète n’ait pu en être la cause.

Ces cas ne sont néanmoins pas rares, puisque des relations conflictuelles peuvent exister entre des directeurs généraux des services et les oppositions municipales. Ces difficultés particulières pourraient également se cristalliser à l’occasion des premiers jours de l’exercice du nouveau mandat municipal.

Toutefois, pour considérer une pathologie comme imputable au service, elle doit être constatée au cours d’un exercice effectif de ces fonctions et il est clairement impossible de préjuger d’une situation, alors même que l’exercice d’un mandat municipal d’opposition est particulièrement différent de la gestion administrative et institutionnelle d’une collectivité.

Enfin, le juge administratif tend à tempérer la portée des avis médicaux produits par les demandeurs eux-mêmes, dans ces contentieux de la fonction publique. En effet, les avis médicaux doivent être regardés comme traduisant le ressenti de l’intéressé et ces certificats doivent d’ailleurs être rédigés avec la plus grande prudence, par les praticiens.

Thomas Porchet
Avocat
DROUINEAU 1927