L’article 96 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dispose que : « La démission ne peut résulter que d’une demande écrite du fonctionnaire marquant sa volonté non équivoque de cesser ses fonctions. Elle n’a d’effet qu’autant qu’elle est acceptée par l’autorité investie du pouvoir de nomination et prend effet à la date fixée par cette autorité. La décision de l’autorité compétente doit intervenir dans le délai d’un mois. L’acceptation de la démission rend celle-ci irrévocable. Cette acceptation ne fait pas obstacle, le cas échéant, à l’exercice de l’action disciplinaire en raison de faits qui seraient révélés postérieurement. Lorsque l’autorité compétente refuse d’accepter la démission, le fonctionnaire intéressé peut saisir la commission administrative paritaire compétente. Celle-ci émet un avis motivé qu’elle transmet à l’autorité compétente. Le fonctionnaire qui cesse ses fonctions avant la date fixée par l’autorité compétente pour accepter la démission peut faire l’objet d’une sanction disciplinaire. Lorsqu’il a droit à pension, il peut supporter une retenue correspondant au plus à la rémunération des services non effectués. Cette retenue est répartie sur les premiers versements qui lui sont faits à ce titre, à concurrence du cinquième du montant de ces versements ». La demande écrite de démission d’un agent doit donc être clairement exprimée, de manière non équivoque et sans ambiguïté. L’administration peut refuser la demande de démission, ou bien l’accepter et dans ce cas, peut fixer une date d’effet différente de celle souhaitée par l’agent et ce, en fonction des impératifs de fonctionnement du service. L’administration dispose d’un délai d’un mois pour notifier sa réponse au fonctionnaire démissionnaire.
En cas de refus, l’autorité territoriale doit motiver sa décision et l’agent peut saisir la commission administrative paritaire. En fin de procédure, l’autorité hiérarchique notifie à l’agent démissionnaire l’arrêté portant radiation des cadres et lui remet les documents de fin d’engagement constitués de l’attestation employeur pour Pôle Emploi et du solde de tout compte.
Également, l’agent démissionnaire est recevable à contester l’arrêté de radiation des cadres devant le juge de l’excès de pouvoir. À ce titre, le juge administratif contrôle la réalité du consentement de l’agent. Ainsi, le Conseil d’État a considéré dans son arrêt n° 124183 du 22 juin 1994, que : « Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que, le 1er mars 1990, à la suite de reproches dont elle avait fait l’objet de la part de la directrice de l’école où elle était employée, Mme X…, femme de service, a été convoquée par le maire de Lançon-Provence et invitée à s’expliquer devant lui et deux de ses adjoints ; qu’au cours de cet entretien, Mme X… a rédigé et signé une lettre de démission ; que cette démission ayant été aussitôt acceptée, le maire, par arrêté du 2 mars 1990, a radié Mme X… des effectifs du personnel communal ; que cependant, par une lettre du 3 mars 1990 Mme X… a déclaré revenir sur la démission qu’elle avait présentée ; Considérant qu’eu égard aux circonstances dans lesquelles elle est intervenue, la démission de Mme X… doit être regardée comme ayant été donnée sous la contrainte ; que le fait qu’elle ait été acceptée par le maire ne faisait pas obstacle à ce que Mme X… la retire ; que, par suite, cette démission ne pouvait servir de fondement à l’arrêté de radiation des cadres intervenu le 3 mars 1990 ». Dans cette affaire, l’agent avait donc présenté sa démission, acceptée immédiatement et donnant lieu à la notification dès le lendemain, de l’arrêté de radiation des cadres.
Toutefois, l’agent avait retiré cette démission le surlendemain et le juge administratif a toutefois retenu l’existence d’un défaut de consentement faisant obstacle à l’établissement d’un arrêté de radiation des cadres et ce, alors même que l’acceptation de la démission rendait celle-ci irrévocable. Ainsi, une démission donnée sous la contrainte acceptée par l’autorité territoriale et ayant même donné lieu à l’établissement de l’arrêté portant radiation des cadres, ne fait pas obstacle à ce que l’agent la retire. L’agent peut donc retirer sa démission après l’acceptation par l’autorité territoriale, que si et seulement si, il est en mesure de démontrer que son consentement a été altéré au moment de l’expression de sa démission. Le juge administratif en retenant l’existence d’un défaut de consentement initial, relève donc l’illégalité de l’arrêté portant radiation des cadres. Également, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé dans son arrêt n° 20MA03782 du 6 mai 2021, que : « 3. D’une part, le courrier du 12 novembre 2018 par lequel M. A a présenté sa démission est rédigé en des termes clairs et argumentés, manifestant sa volonté non équivoque de cesser ses fonctions en arguant d’un mal-être lié à ses conditions de travail. Les avis médicaux que produit l’intéressé, qui ne décrivent aucune pathologie psychiatrique précise et se bornent à indiquer qu’il agit de manière irraisonnée et imprévisible, alors au demeurant que le requérant n’a manifesté son souhait de retirer sa démission qu’un mois après l’avoir présentée et qu’il a contacté l’établissement à plusieurs reprises pendant ce délai, afin de s’enquérir de l’avancée de sa démarche, ne sont pas de nature à établir qu’il se trouvait, lorsqu’il a présenté de sa demande, dans un état de santé le mettant hors d’état d’apprécier la portée de sa décision. 4.
D’autre part, à supposer qu’au cours de l’entretien téléphonique du 10 décembre 2018 qu’il a eu avec le pôle ressources humaines du CHU de Nice, M. A ait, comme il le soutient, exprimé la volonté de retirer sa demande de démission, il n’a ainsi fait connaître à son employeur sa volonté de se rétracter qu’après que sa demande eut été acceptée le 29 novembre 2018. La circonstance que cette acceptation ne lui a été notifiée que le 14 décembre 2018 étant sans incidence à cet égard. 5. Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, la démission présentée par M. A ne peut être regardée comme entachée d’un vice de consentement ». Dans cette affaire, la Cour administrative d’appel a considéré que l’agent démissionnaire n’avait fait part de sa volonté de retirer sa demande de démission qu’après son acceptation par l’autorité territoriale et donc postérieurement à l’acquisition de son caractère définitif. Dans cette affaire et à la différence de la précédente, le juge administratif ne retient pas l’existence de circonstances de nature à établir que le consentement de l’agent démissionnaire aurait été altéré. L’acceptation devenue définitive ne souffrait donc d’aucun vice du consentement. Dans une telle situation, il appartient donc à l’agent qui conteste l’arrêté portant radiation des cadres, d’établir l’existence de situations ayant altéré son consentement et qui peuvent ressortir, soit du comportement de l’autorité hiérarchique relevant d’une contrainte particulière, soit d’un état de santé intrinsèque à l’agent pouvant altérer son discernement. Enfin, la démission ne constituant pas une privation involontaire d’emploi, elle n’ouvre pas droit au versement de l’aide au retour à l’emploi, sauf en cas de motif légitime lié par exemple à une démission pour suivre un conjoint.
Auteur
Thomas PORCHET