Récupération et valorisation des métaux issus de la crémation : pas d’atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, ni même au droit de propriété
Pour rappel, parmi les différentes modifications opérées par la loi dite 3DS du 21 février 2022, l’une des plus délicates était sans conteste celle relative à la valorisation des métaux issus de la crémation par l’instauration de l’article L. 2223-18-1-1 du code général des collectivités territoriales.
Ces dispositions qui, même si en réalité, ne constituent qu’une validation législative d’une pratique qui existe depuis plusieurs années, peuvent être accueillies défavorablement par les proches des défunts incinérés, voire les choquer.
A la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil Constitutionnel a, par une décision du 18 janvier 2024 (n° 2023-1075), déclaré ces dispositions conformes à la Constitution.
La requérante faisait valoir, de manière pertinente, que les éléments implantés dans le corps humain deviennent, par destination, un élément du corps humain ce qui rend impossible une valorisation de ces éléments.
Elle faisait également valoir qu’en tout état de cause, à supposer que ces éléments ne puissent pas être regardés comme des éléments du corps humain, il n’en demeure pas moins que les crématoriums ne peuvent en détenir la propriété qui en reviendrait alors aux familles.
Sur la première question, le Conseil Constitutionnel n’a pas suivi cette voie, et a estimé que les métaux issus de la crémation sont distincts des cendres du corps du défunt, quand bien même ils proviendraient d’objets intégrés au corps de ce dernier.
On pourra toutefois regretter l’absence d’éléments complémentaires permettant de comprendre le raisonnement du Conseil sur la distinction des métaux et des cendres du défunt.
Sur la seconde question qui leur était posée, les Sages ont estimé qu’il n’y aurait aucune privation des droits de propriété, tout en rappelant que l’article L. 2223-18-1-1 du code général des collectivités territoriales poursuit un objectif d’intérêt général. Le Conseil a considéré qu’elles n’avaient ni pour objet ni pour effet de priver les ayants droits des droits qu’ils peuvent faire valoir en temps utile sur ces biens en vertu de la loi successorale.
Par ailleurs, il prend le soin de rappeler l’information préalable des familles sur les conditions de récupération des métaux issus de la crémation ainsi que sur les règles d’affectation du produit éventuel de leur cession.
Cette position du Conseil Constitutionnel est la bienvenue si l’on ne prend en compte que l’aspect purement pratique d’une crémation : à l’issue d’une crémation, il apparait matériellement impossible d’opérer une distinction entre les différents matériaux (matériaux qui seraient intégrés au corps humain ou non).
De plus, il parait tout aussi difficile d’intégrer les métaux incorporés au corps humain, comme des prothèses, dans l’actif successoral.
Reste à connaitre dorénavant la réaction de la famille du défunt lorsqu’elle sera informée de la récupération et de la valorisation des métaux issus de la crémation de leur proche…