Le banc d’Arguin sera protégé

Actualités juridiques Drouineau 1927

Le banc d’Arguin sera protégé

Autres actualités

L’érosion littorale, un exemple concret d’action : la commune de Saint-Vincent sur Jard

Dans un reportage récemment diffusé, une chaîne nationale s’est intéressée aux conditions dans lesquelles la commune de Saint-Vincent sur Jard envisage la renaturation pure et simple d’une partie de son territoire en considération de l’érosion...

Loi Anti-Airbnb du 7 novembre 2024

Loi Anti-Airbnb du 7 novembre 2024 : Un « tour de vis » en vue de réguler les locations de courtes durées Le 7 novembre 2024, les députés ont adopté une nouvelle législation surnommée la “loi Anti-Airbnb”,...

Interdiction d’habiter : un risque grave n’est pas un risque imminent

Par arrêté du 24 octobre 2022, le préfet de la Corse-du-Sud, après avoir en vain mis en demeure le maire de Bonifacio de faire usage de ses pouvoirs de police, a ordonné l’évacuation avec interdiction d’habiter de...

Une occupation gratuite du domaine public pour toutes les associations 

Une occupation gratuite du domaine public pour toutes les associations : c’est possible depuis la loi n°2024-334 du 15 avril 2024 visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative Les associations constituent un socle...

Point sur la nature du contentieux des contestations d’attribution de conventions domaniales

Depuis l’ordonnance n°2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques, l’occupation ou l’utilisation du domaine public est soumise à une procédure particulière. Effectivement, l’article L. 2122-1-1 du code général de la...

Condamnation à la démolition d’une villa menacée par l’érosion

Par un jugement du 1er octobre 2024, le Tribunal Judiciaire de Bordeaux a condamné le propriétaire d’une villa au Cap Ferret à la démolir. En février 2017, un permis de construire a été délivré sur...

Bail commercial sur le domaine public irrégulièrement déclassé

Le bail commercial est aux yeux de nombreux professionnels du droit, ou des affaires, l’outil unique propre à permettre le développement d’un fonds de commerce. Sur des propriétés publiques, il ne peut cependant être conclu...

La tempête Kirk

Le recul du trait de côte les tempêtes événementielles : la tempête Kirk. La tempête Kirk qui balaie actuellement la France, concerne 30 départements dont une immense majorité de départements littoraux. Des pluies remarquables voire...

Que peut faire une commune des parcelles abandonnées sur sa commune ?

Des propriétaires absents depuis de longues années, de la végétation à perte de vue, des voisins se plaignant de l’état d’abandon des parcelles auprès de la commune… Quels sont les outils juridiques dont dispose la...

ZAN et recul du trait de côte

Pour concilier l’objectif ZAN et les politiques d’adaptation au recul du trait de côte, il est prévu une méthode de calcul particulière pour les communes inscrites au décret-liste. Comment allier l’adaptation au recul du trait...

En découvrir plus sur le cabinet Drouineau 1927

Domaine public

Le banc d’Arguin sera protégé

Dans une décision du 3 juin 2020 numéro 414018, le conseil d’État est venu rendre une décision relative au banc d’Arguin, zone bien connue du bassin d’Arcachon.

Il s’agissait de demander l’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite du premier ministre rejetant la demande présentée le 28 juin 2017 d’annulation d’un décret du 10 mai 2017 portant extension et modification de la réserve nationale du banc d’Arguin.

Le conseil d’État se livre à une analyse exhaustive de la légalité tant externe qu’interne du décret attaqué.

Il rappelle que la réserve naturelle du banc d’Arguin est située au large de la côte, dans la mer territoriale, et fait partie du domaine public maritime de l’État en application de l’article L2111 – 4 du code général de la propriété des personnes publiques.

Il est intéressant de rappeler le premier enseignement de cet arrêt qui fait le départ entre ce qui procède du domaine public maritime de l’État et ce qui relève de la responsabilité des communes.

Le conseil d’État rappelle en effet que la commune de La Teste de Buch n’est pas propriétaire ni titulaire de droits réels dans la réserve naturelle du banc d’Arguin, raison pour laquelle son opposition à l’extension de la réserve n’impliquait pas l’intervention d’un décret en conseil d’État.

C’est la différence entre ce qui relève de la responsabilité de l’État au titre du domaine public maritime, et ce qui relève de la responsabilité des communes.

L’enseignement de cette décision est en réalité ce qui procède des modalités de classement d’une réserve naturelle nationale.

Sont rappelées les dispositions de l’article L332 – 1 du code de l’environnement selon lesquelles des parties du territoire terrestre ou maritime d’une ou de plusieurs communes peuvent être classées en réserve naturelle lorsque la conservation de la faune, de la flore, du sol, des eaux, des gisements de minéraux de fossiles, en général du milieu naturel, présente une importance particulière ou qu’il convient de les soustraire à toute intervention artificielle susceptible de les dégrader.

On voit bien l’objet de cet article qui est d’éviter que des appétits féroces s’intéressent aux ressources naturelles et engendrent des dégradations irréversibles.

Le conseil d’État déduit de ces dispositions que peuvent être classées en réserve naturelle nationale les parties du territoire au sein desquelles la conservation des espèces et du milieu naturel revêt une importance écologique et scientifique particulière.

Il ajoute toutefois que les zones qui contribuent directement à la sauvegarde de ces parties du territoire, en particulier lorsqu’elles en constituent d’un point de vue écologique une extension nécessaire, ou qu’elles jouent un rôle de transition entre la zone la plus riche en biodiversité et le reste du territoire, peuvent également être classées en réserve naturelle nationale.

C’est un point de vue extrêmement intéressant car, de fait, il conduit à une extension du périmètre des réserves naturelles nationales.

Si l’on y trouve un cœur, la zone la plus riche sur les aspects faunistiques et floristiques, le conseil d’État admet au visa de l’article L 332-1 du code de l’environnement, qu’il est possible d’instaurer une sorte de glacis, une zone de défense qui, moins riche sur les aspects faunistiques et floristiques, contribue cependant directement à la sauvegarde de ces parties du territoire.

C’est un point de vue extrêmement pragmatique que l’on ne peut que saluer.

Au visa de cette analyse, le conseil d’État rejette la demande d’annulation considérant que le décret est parfaitement régulier.

L’association avait pourtant soulevé plusieurs moyens intéressants, notamment celui qui considérait que l’article 17 du décret attaqué, interdisant du coucher au lever du soleil le stationnement et la circulation des personnes de quelque manière que ce soit y compris à pied sur l’estran, méconnaissait les dispositions de l’article L332 – 3 et était entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qu’il interdisait la pratique nocturne de la pêche à la ligne dans les vagues, pratiquée depuis les rochers, les plages et les digues, alors que ces pratiques seraient sans danger pour la faune aviaire.

Le conseil d’État retoque cette analyse, considérant qu’il ressort des pièces du dossier que cette interdiction est justifiée non pas par les prélèvements piscicoles des pêcheurs, mais par les effets de la présence humaine sur les espèces émergées.

Il n’y aura donc plus dans la zone concernée de pêche nocturne à la ligne dans les vagues.

Il n’y aura pas non plus de mouillages des navires puisque l’interdiction et la limitation du mouillage des navires, édictées par l’article 19 du décret attaqué est maintenue.

Le conseil d’État estime qu’il ne s’agit pas d’une discrimination en faveur des plaisanciers les plus proches de la réserve nationale ni même que cela implique des conséquences disproportionnées sur l’activité touristique.

Là encore, le conseil d’État rappelle que c’est bien la présence humaine et ses conséquences sur l’avifaune qui imposent d’assurer sa quiétude dans l’ensemble de la réserve.

L’interdiction et la limitation du mouillage concernent tous les plaisanciers, quelle que soit la proximité de leur lieu de mouillage avec le périmètre de la réserve nationale.

Les oiseaux et les poissons peuvent dormir tranquilles, il n’y aura ni pêcheurs ni bateaux à l’ancre dans la réserve naturelle nationale du banc d’Arguin.

L’analyse pertinente du conseil d’État mériterait d’être largement développée, pour permettre que les réserves nationales ne soient pas dans leur frontière limitées aux zones les plus riches, mais étendues à ces zones qui, en bordure, assurent une protection efficace des milieux les plus riches et les plus fragiles.

Thomas Drouineau
Avocat associé
DROUINEAU 1927