Délégation de service public : Titre exécutoire de recouvrement de pénalités et procédure de règlement amiable des litiges

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Délégation de service public : Titre exécutoire de recouvrement de pénalités et procédure de règlement amiable des litiges

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Procédure

Délégation de service public : Titre exécutoire de recouvrement de pénalités et procédure de règlement amiable des litiges

A l’occasion de la contestation juridique des titre exécutoires, le délégataire doit-il mettre en œuvre cette procédure, avant tout contentieux, pour assurer la recevabilité de sa requête ?
L’autorité délégante doit-elle mettre en œuvre la procédure de règlement amiable prévue au contrat, avant d’émettre un titre exécutoire relatif à des pénalités pour manquements contractuels du délégataire ?

Le Conseil d’État a répondu à ces questions dans l’arrêt des 2ème et 7ème chambres réunies n° 431903 en date du 12 octobre 2020.

D’abord, sur la première question relative à la recevabilité de la requête, le Conseil d’État a considéré que :
« 5. Aux termes de l’article 46 du contrat conclu entre la commune d’Antibes et la société Vert Marine, relatif au règlement des différends :  » L’autorité délégante et le délégataire conviennent que les différends qui résultent de l’interprétation ou de l’application du contrat ou de ses annexes font l’objet d’une tentative de conciliation par un expert désigné d’un commun accord et dont la charge est partagée à parts égales entre les parties. A défaut de nomination de l’expert ou de conciliation dans un délai de deux mois à compter de la constatation du litige, la partie la plus diligente peut soumettre le litige à la juridiction administrative compétente, soit le tribunal administratif de Nice « .
6. Il résulte de l’instruction que les titres exécutoires émis par la commune d’Antibes à l’encontre de la société Vert Marine indiquaient, s’agissant des délais et voies de recours, que les sommes mentionnées sur les titres pouvaient être contestées  » en saisissant directement le tribunal judiciaire ou administratif compétent selon la nature de la créance « . En ne mentionnant pas, dans la notification des titres en litige, l’obligation, pour la société Vert Marine, de respecter les stipulations contractuelles de l’article 46 citées au point précédent, qui imposent une tentative de conciliation par un expert avant toute saisine de la juridiction administrative, la commune d’Antibes doit être regardée comme ayant renoncé à opposer ces stipulations à cette société. Par suite, la commune d’Antibes n’est pas fondée à opposer à la société Vert Marine le non-respect des stipulations contractuelles applicables en matière de différends pour contester la recevabilité des recours introduits devant le tribunal administratif de Nice, par la société, à l’encontre des titres exécutoires en litige ».

Ainsi, l’autorité délégante en ne mentionnant pas dans les voies et délais de recours l’obligation préalable de conciliation, doit être regardée comme ayant renoncé à cette perspective. Une fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de la requête est donc écartée.

Cette solution permet au Conseil d’État de juger l’affaire au fond. Ainsi, à la seconde question posée ci-dessus, le juge administratif répond que :
« 3. Aux termes de l’article 34 du contrat du 19 octobre 2012 relatif aux sanctions pécuniaires :  » Dans les conditions prévues ci-dessous, faute pour le Délégataire de remplir les obligations qui lui sont imposées par le contrat, des pénalités peuvent lui être infligées par l’Autorité délégante. / (…) / 1° Exploitation du service : en cas de retard dans l’entrée en fonctionnement du service du fait du Délégataire, d’interruption générale ou partielle, (…) après une mise en demeure restée infructueuse pendant deux jours calendaires, le Délégataire peut être redevable sur décision de l’autorité délégante d’une pénalité forfaitaire égale à 2 000 euros par jour à compter du jour suivant la réception (…) par le délégataire, de la mise en demeure restée infructueuse et jusqu’au rétablissement de la situation normale / (…) / 3° En cas de non-production des documents et pièces prévus aux Articles 13 ou 30, du présent Contrat, dans les délais impartis, et 2 jours calendaires après une mise en demeure restée infructueuse, une pénalité égale à 500 € par jour de retard sera appliquée (…) « .
(…).
14. Il résulte de l’instruction que la commune d’Antibes a mis en demeure la société Vert Marine d’exécuter ses obligations contractuelles, puis émis les titres exécutoires litigieux, en application de l’article 34 précité du contrat. La société Vert Marine soutient que les stipulations de l’article 46 du contrat, citées au point 5, s’opposaient à ce que la commune d’Antibes émette des titres exécutoires sans engager la procédure de règlement des différends qu’elles prévoient, qui impose une tentative de conciliation par un expert désigné d’un commun accord avant de saisir le juge. La commune ne peut toutefois être regardée, en ce qu’elle a mis en œuvre les sanctions pécuniaires prévues par le contrat faute pour le délégataire de remplir ses obligations contractuelles, sanctions dont le prononcé est lui-même subordonné à une mise en demeure préalable, comme ayant eu un différend sur l’application ou l’interprétation du contrat au sens de l’article 46 du contrat, article qui au surplus figure dans un chapitre distinct de celui relatif aux sanctions, dans lequel est situé l’article 34. Il s’ensuit que la société Vert Marine n’est pas fondée à soutenir que la commune d’Antibes aurait dû mettre en oeuvre la procédure de règlement amiable des différends prévue à l’article 46 du contrat avant d’émettre ces titres ».

Ce considérant n° 14 est parfaitement clair. Par les mises en demeure et l’émission des titres exécutoires subséquents, l’autorité délégante a mis en œuvre à bon droit, les stipulations contractuelles adéquates, sans que l’engagement de cette procédure prévue au contrat, ne soit constitutif d’un différend.
Autrement dit dans cette perspective, l’autorité délégante n’est pas tenue de mettre en œuvre la procédure de règlement amiable des différends, avant l’émission des titres exécutoires.

Thomas Porchet
Avocat
DROUINEAU 1927