Il n’est pas rare dans certaines communes de taille intermédiaire, que des adjoints, en l’absence dans l’organigramme d’un responsable de service, s’approprient ou s’attribuent ces fonctions qui dépassent le simple cadre de la déclinaison d’une feuille de route politique.
Les agents des collectivités territoriales et notamment les directeurs généraux des services, confrontés à ces difficultés, qualifient ces élus d’ « adjoints chefs de service ».
Les agents se retrouvent quant à eux confrontés à des ordres et contre ordres, alors même qu’ils relèvent d’une seule et même autorité territoriale. Les maires confrontés à ces difficultés doivent, dans cette relation triangulaire, rappeler aux adjoints et aux agents notamment contractuels, le nécessaire respect des clauses des contrats et donc du volume horaire préalablement défini.
Le premier alinéa de l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales dispose que :
« Le maire est seul chargé de l’administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l’absence ou en cas d’empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d’une délégation des membres du conseil municipal ».
En ce sens, la jurisprudence administrative a attribué au maire dès 1914, la qualité de chef de l’administration communale (Conseil d’Etat, 11 mai 1914 « Barthez » et Cour administrative d’appel de Bordeaux, 15 novembre 1999, « Dumoulin de Laplante »).
Le maire est le supérieur hiérarchique des agents municipaux et il dispose d’un pouvoir d’organisation des services.
Le maire assure la gestion du personnel communal sous la double contrainte d’une part, des besoins du service et d’autre part, des marges de manoeuvre budgétaire. A ce titre, le dépassement régulier des horaires de travail engendre des dépenses supplémentaires.
Le maire est donc seul responsable du respect des modalités de réalisation des missions d’un agent de la collectivité.
Mais alors, le maire peut-il informer les adjoints, qu’ils ne peuvent pas solliciter directement le personnel communal pour des travaux supplémentaires ou au moins avec l’anticipation adéquate et conformément aux prévisions établies ?
Le maire, même s’il peut déléguer sa signature, reste le responsable du personnel communal, puisqu’il délègue, sous sa surveillance et sa responsabilité. Les adjoints disposent d’un pouvoir de décision, uniquement dans le cadre de leurs délégations de fonction respectives, décidées par arrêté du maire et si ce dernier décide de ne pas en faire usage directement.
Il convient donc de vérifier, d’une part le domaine de compétence faisant l’objet d’une délégation (personnel, services techniques…) et d’autre part, l’étendue de cette délégation, de fonction, ou de signature (Conseil d’Etat, 2 février 1951, « Préfet de la Marne »).
Le maire dispose toujours de la faculté de mettre en œuvre ses pouvoirs propres et le cas échéant, de retirer les délégations aux adjoints. Toutefois, l’impact du comportement de certains adjoints sur la gestion du personnel communal se traduit généralement de manière factuelle et non pas juridiquement.
Le maire, chef de l’administration communale peut informer ses adjoints, de ses choix d’orientations en termes de gestion du personnel et doit rappeler son rôle de chef de l’administration communale.
En tant qu’autorité territoriale, le maire peut-il modifier le contrat de l’agent contractuel et peut-il convoquer ce dernier afin de lui rappeler le nécessaire respect de ses clauses contractuelles, notamment de son volume horaire ?
Les alinéas 2 et 3 de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, disposent que :
« Les règles relatives à la définition, à la durée et à l’aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa de l’article 2 sont fixées par la collectivité ou l’établissement, dans les limites applicables aux agents de l’Etat, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements.
Un décret en Conseil d’Etat détermine les conditions d’application du premier alinéa. Ce décret prévoit les conditions dans lesquelles la collectivité ou l’établissement peut, par délibération, proposer une compensation financière à ses agents, d ‘un montant identique à celle dont peuvent bénéficier les agents de l’Etat, en contrepartie des jours inscrits à leur compte épargne-temps ».
Les heures supplémentaires, sont effectuées à la demande du chef de service. L’absence de chef de service renvoie directement cette faculté au chef de l’administration communale, autrement dit, au maire autorité territoriale et non pas à l’adjoint en charge de la délégation concernée.
Le maire peut donc parfaitement convoquer l’agent et exiger qu’il effectue ses missions, conformément à ses obligations contractuelles. Il ne peut en revanche, lui seul, modifier de manière pérenne le temps de travail fixé dans le contrat de l’agent. En effet, seul le conseil municipal a la faculté de définir un nouveau cycle de travail, rendu nécessaire par l’évolution du service ou des fonctions.
Thomas Porchet
DROUINEAU 1927
Avocat